
Lyon alterne les biennales : les années paires, c'est l'art contemporain qui envahit la ville, les années impaires c'est le tour de la danse.
La particularité de ces deux biennales est d'occuper plusieurs lieux à Lyon et dans sa banlieue.
On admire, on aime, on se sent agressé... on n'aime pas... le pire étant de rester indifférent ou en-dehors.
Cette année, la 17ème biennale d'art contemporain a fait fort : elle a envahi 8 lieux, des plus populaires (le métro) aux plus prestigieux (fondation Bullukian ou MAC).
Parcourir ces lieux, c'est prendre le pouls de la planète, sentir les obsessions d'un monde qui se transforme et regarder l'avenir dans une boule de cristal majuscule. C'est aussi vérifier que les artistes cherchent à se mettre à la hauteur d'un public populaire, et non de quelques investisseurs initiés et experts.
La notion du beau n'est pas toujours présente, mais j'apprécie que l'ambition esthétique se combine à l'utile, et parfois même au futile...
Cette année, j'ai été particulièrement séduit par des artistes qui ont réussi à s'emparer des espaces énormes qui leur étaient offerts.
3 oeuvres présentes aux Grandes Locos m'ont pris par la main et carrément bluffé :
1) Les Marmites Enragées de Pilar Albarracin, artiste andalouse, m'ont fait retourner la tête en entonnant leur sifflement qui reprenait les mesures d'un couplet et du refrain de l'Internationale de Jean-Baptiste Clément. Cette oeuvre de 2006, était tout à fait à sa place dans cette citadelle ouvrière... D'autres oeuvres de la même artiste étaient également présentes sur d'autres lieux de la Biennale.

2) Au sous-sol de la Halle 2 des Grandes Locos (tout au bout du parcours), je suis resté envoûté par l'installation grandiose d'Oliver Beer faite d'images, de couleurs et de sons. Des voix chaudes et douces résonnent et se répondent dans cet espace immense, soutenues par des images enregistrées dans des grottes ornées. Elles vous invitent à descendre dans un cocon où les couleurs douces, cette fois-ci, prennent la main avec le fond sonore des chants du monde. Un enchantement... alors que je n'aime pas habituellement les installations à base de vidéos.

3) Un grand tube en bois ajouré long comme le fuselage d'un avion long courrier occupe l'espace et vous attire dans la Halle 1 des Grandes Locos. Irrésistiblement, vous entrez dans le tube avec l'idée de le traverser et vous découvrez des lumières, des pensées qui vous transpercent et des réflexions sur les déplacements et les migrations. Une expérience imaginée par Hans Schabus avec son Monument for People on the Move.
Un grand cru d'une Biennale apaisante et apaisée qui suit les voix des fleuves.
A signaler également la Blue Room de Grace Ndiritu au Musée d'Art Contemporain, le monde déshumanisé mais rempli d'oiseaux blancs d'un poétique Chourouk Hriesch, des oeuvres de l'incontournable Annette Messager sur plusieurs lieux et une impression d'ensemble d'un art contemporain qui tourne le dos aux provocations intempestives pour interroger le spectateur au lieu de le désarçonner...